IPO de Circle : Un nouveau benchmark pour la valorisation des stablecoins ?
30 juillet 2025

Le succès de Circle en bourse témoigne de l'intérêt institutionnel pour le secteur des stablecoins. Dans cette analyse, nous revenons sur l'IPO de Circle, les performances et les principales métriques financières, afin de dresser un modèle de valorisation pour un autre proxy des stablecoins en bourse : Ethena (ENA).
L’essor des stablecoins
Les stablecoins se sont distingués par leur capacité unique à offrir aux marchés émergents un accès permissionless au dollar américain, tout en permettant des transactions transfrontalières instantanées et à coût réduit. Ils constituent aujourd’hui un vecteur d’adoption majeur pour l’écosystème crypto, facilitant l’intégration de nouveaux utilisateurs à l’échelle mondiale.
À cet égard, les volumes de transactions réalisés via les stablecoins ont atteint un sommet historique de 1,82 trillion de dollars en avril 2025, dépassant de 10 % le volume annuel combiné des transferts Visa et Mastercard (27,6 trillions de dollars) enregistré en 2024.
La capitalisation totale du marché des stablecoins franchit désormais le seuil des 250 milliards de dollars, et ne montre aucun signe de ralentissement. L’un des indicateurs clés est la quantité de bons du Trésor américain détenus par les émetteurs de stablecoins : 128 milliards de dollars, les positionnant parmi les vingt plus grand détenteurs au monde.

Dans ce contexte, l’introduction en bourse (IPO) de Circle a été un moment historique pour le marché des stablecoins. Elle est le point d’inflexion susceptible d’accélérer leur adoption, de renforcer l’ancrage des actifs numériques dans la finance traditionnelle et d’encourager d’autres entreprises de l’industrie crypto à viser une cotation publique aux États-Unis.
La présente recherche vise à offrir une analyse critique de l’IPO de Circle, de ses performances financières, de son impact sur le marché et de ses implications pour l’adoption des stablecoins. Enfin, elle propose d’utiliser l’introduction en bourse de Circle comme proxy pour proposer un cadre de valorisation d’un autre acteur du marché des stablecoins : Ethena.
IPO de Circle et évolution du prix
Rappel sur Circle
Circle Internet Group, Inc., plus connu sous le nom Circle, est l’émetteur de deux stablecoins indexés sur des monnaies fiat : l’USDC (indexé sur le dollar américain) et l’EURC (indexé sur l’euro). Lancé en 2018, l’USDC est le deuxième plus grand stablecoin du marché, juste derrière l’USDT de Tether, avec environ 62 milliards de dollars en circulation en juillet 2025.
L’USDC est adossé à des réserves composées d’actifs très liquides, dont des bons du Trésor américain (T-bills), des liquidités détenues auprès de banques systémiques mondiales (GSIBs) et d’autres titres publics à court terme.
IPO de Circle
Le 5 juin 2025, Circle a mené avec succès son introduction en bourse, devenant ainsi le premier émetteur de stablecoin à être côté à la Bourse de New York (NYSE). Parmi les premiers soutiens figuraient ARK Invest, JPMorgan, Goldman Sachs et BlackRock, qui ont permis de lever 1,05 milliard de dollars via la vente de 34 millions d’actions à 31 dollars chacune, soit bien au-dessus de la fourchette initiale de 27 à 28 dollars.
L’offre a été sur-souscrite plus de 25 fois, faisant de cette IPO la plus importante du secteur crypto aux États-Unis depuis Coinbase en 2021 et soulignant la demande institutionnelle pour une exposition aux stablecoins.
Le cours de l’action, sous le ticker “CRCL”, a débuté au prix de 64 dollars, valorisant ainsi Circle près de 18 milliards de dollars en fully diluted value. Dès le premier jour, CRCL a grimpé jusqu’à 103,75 dollars, avec plusieurs interruptions de cotation pour cause de volatilité. Le titre a clôturé à 83,23 dollars, soit une hausse d’environ 168 % par rapport au prix d’introduction.
Évolution du CRCL
Cette hausse s’est poursuive pendant plusieurs jours et a poussé l’action jusqu’à 299 dollars, le 23 juin, soit une hausse de 367 % par rapport au prix d’introduction. Finalement, l’action CRCL a corrigé de 42 % jusqu’au 1er juillet, avant de rebondir de 53 % et de finir par se stabiliser au cours actuel de 193 dollars (-35 % par rapport à l’ATH).
Il convient de noter que cette cotation réussie intervient après l’échec d’une fusion SPAC de 9 milliards de dollars en 2022. À l’époque, Circle avait rencontré des difficultés pour obtenir l’approbation de la SEC, dans un environnement réglementaire très scruté sous l’administration Biden.
Désormais, sous une administration Trump nettement plus favorable à la crypto, le projet de loi GENIUS (Guiding and Establishing National Innovation for U.S. Stablecoins) vise à instaurer des règles de réserve 1:1 au niveau fédéral. En établissant un cadre fédéral clair, la loi GENIUS pourrait légitimer les stablecoins, favoriser leur émission et justifier des primes de valorisation via une adoption institutionnelle et retail élargie.
Facteurs clés du succès de l’IPO de Circle
À mesurer que le marché grandit et mûrit, les investisseurs se détournent progressivement des projets purement spéculatifs ou des espoirs démesurés de trouver le prochain “token x100”. Les investisseurs particuliers cherchent des stratégies de rendements sur stablecoins, ce qui, par effet d’entraînement, stimule l’intérêt institutionnel pour ces actifs.
Conçus pour conserver une valeur stable, les stablecoins sont naturellement attractifs pour la préservation du capital, mais également pour générer des rendements lorsqu’ils sont correctement intégrés dans la finance décentralisée, comme c’est le cas de l’USDC. C’est la raison pour laquelle l’IPO de Circle se présentait comme un proxy institutionnel pour miser sur les stablecoins.
Demande institutionnelle
Les investisseurs reconnaissent de plus en plus les stablecoins comme des ponts essentiels entre la finance traditionnelle et les actifs numériques. De grandes banques et institutions financières américaines ont noué des partenariats avec des émetteurs de stablecoins et des fournisseurs d’infrastructures, validant cette classe d’actifs et attirant du capital institutionnel.
Exemples notables :
- Le stablecoin RLUSD de Ripple, qui circule désormais au-delà de 500 millions de dollars,
- Le partenariat entre la Bank of New York Mellon et Circle, permettant aux clients bancaires d’interagir directement avec l’USDC pour la création et le rachat,
- L’utilisation par PayPal de son stablecoin adossé au dollar (PYUSD) pour les transactions commerciales.
Conformité réglementaire et transparence des réserves de Circle
À la différence de Tether, basé offshore et peu transparent, Circle opère sous de multiples licences, dont celles de “money transmitter” dans 46 États américains, une BitLicense du NYDFS (État de New York), ainsi que des licences internationales comme celle d’Electronic Money Institution (FCA britannique) et la conformité au règlement européen MiCA.
En tant que société cotée au NYSE, Circle est soumise aux obligations de publication auprès de la SEC, incluant des audits annuels de ses finances et de ses réserves. L’USDC est adossé 1:1 à des actifs libellés en dollars américains, principalement en cash et bons du Trésor à court terme, détenus sur des comptes séparés des fonds opérationnels de Circle.
Le Circle Reserve Fund, un fonds monétaire enregistré auprès de la SEC et géré par BlackRock, détient la majorité des réserves d’USDC. Des attestations mensuelles d’un cabinet “Big Four” (actuellement Deloitte & Touche LLP) certifient que les actifs de réserve excèdent l’USDC en circulation.
Modèle économique de Circle
La principale source de revenus de Circle est le “reserve income”, c’est-à-dire les intérêts générés par les réserves adossant l’USDC. En 2024, Circle a affiché un revenu total (incluant reserve income) de 1,676 milliard de dollars, dont 1,661 milliard (99 %) provient des intérêts sur les réserves.
Entre 2023 et 2024, le reserve income a augmenté de 1,430 milliard à 1,661 milliard (+16,2 %), reflet de la hausse des taux d’intérêt et de la progression de l’USDC en circulation (de 55 à 62 milliards de dollars).
Pour 2025, la performance du premier trimestre suggère un reserve income annualisé de 2,314 milliards sur 62 milliards de réserves, soit un rendement effectif d’environ 3,73 %. Cette croissance reste cohérente avec la hausse des taux, dans un environnement favorable à la rentabilité.
Métriques financières et valorisation de Circle
La croissance financière de Circle est avant tout tirée par les intérêts sur les réserves e, USDC, ce qui la rend très sensible à deux facteurs : l’évolution des taux d’intérêts de la dette américaine à court terme, et le montant total d’USDC en circulation.
Commençons d’abord par une analyse synthétique du modèle de revenus actuel de Circle, de l’impact des taux et des leviers d’augmentation des revenus, puis considérons ensuite l’adoption utilisateur (émission d’USDC), l’activité on-chain et la domination par écosystème, ainsi que le marketcap et le volume de transactions de l’USDC.
Revenus
En 2024, le revenu annuel de 1,68 milliard de dollars reflète une croissance de 15,57 %. Circle a affiché 578,57 millions de dollars de revenus sur le trimestre clos au 31 mars 2025, portant le revenu des douze derniers mois à 1,89 milliard de dollars, en hausse de 983,18 % sur un an.

Alors que le rendement des T-bills américains tourne autour de 4,3 %, le rendement total sur réserves de Circle était de 2,68 % en 2024. Cela reflète la composition des réserves : 85 % d’actifs porteurs d’intérêts dans le Circle Reserve Fund, 10-15 % en cash non rémunéré dans des banques partenaires.
Calculé au taux SOFR, le rendement effectif atteint 3,15 % (1,661 milliard divisé par 85 % de 62 milliards de dollars de réserves).
L’accord de partage des revenus avec Coinbase implique qu’environ 50 % des intérêts générés par les réserves USDC sont reversés à l’exchange. En tenant compte de ce partage et des coûts opérationnels (167 millions de dollars), Circle affiche un bénéfice net de 156 millions de dollars pour 2024.
Tout cela traduit une dépendance importante de la rentabilité aux T-bills américains et donc une sensibilité aux taux de la dette américaine
Impact des taux d’intérêt
- Scénario I (baisse des taux)
Si les effets des politiques tarifaires de l’année sont moindres que prévu et que d’autres forces désinflationnistes sont plus importantes, la probabilité de baisse des taux demeure tout de même très élevée aux États-Unis (certaines projections visent le dernier trimestre).
- Reserve Income = 0,85 × 62 milliards $ × 1,95 % = 1,03 milliard $
- Variation par rapport à 2024 : 1,03 Md$ - 1,661 Md$ = - 631 M$
- Nouveau bénéfice net (si base précédente 156 M$) : 156 M$ - 631 M$ = -475 M$
Il reste possible que les rendements obligataires n’évoluent pas exactement au même rythme que les taux directeurs, mais une telle configuration impliquerait un ajustement de gestion des fonds.
- Scénario II (hausse des taux)
Si les taux montent à 5 %, le rendement effectif grimpe à 3,67 %, soit un reserve income de 1,934 milliard de dollars.
- Variation : 1,934 Md$ – 1,661 Md$ = +273 M$
- Nouveau bénéfice net : 156 M$ + 273 M$ = 429 M$
Cela montre que le yield sur les réserves constitue un levier de croissance majeure pour Circle, capable de doubler ou tripler ses revenus. Néanmoins, ce scénario semble moins probable.
Price-to-Earnings (P/E) Ratio
Le ratio prix/revenus (P/E) de Circle, actuellement à 2 536, soulève des inquiétudes quant à une “survalorisation extrême”, la société devant afficher une perte en 2025. Toutefois, le soutien d’investisseurs de renom comme ARK Invest ou BlackRock indique que le marché est prêt à miser sur une adoption de masse réelle.
Circulation d’USDC
La quantité d’USDC atteint désormais un record de 62 milliards de dollars, confortant la position stratégique de Circle sur le secteur des stablecoins. L’exigence d’une réserve en 1:1 crée une boucle où les réserves augmentent lorsque la quantité d’USDC en circulation augmente, ce qui en fait un bon indicateur de la santé financière de Circle.
Autrement dit, cette dynamique est directement liée à l’adoption et l’utilisation de l’USDC dans l’écosystème. Le nombre moyen d’utilisateurs quotidiens progresse régulièrement, en hausse de 118,55 % depuis le début de l’année.

Le volume de transactions sur 365 jours atteint 34,4 milliards de dollars. Au fil du temps, l’activité des utilisateurs d’USDC, initialement concentrée sur Ethereum, s’est répartie sur Solana, les blockchains de layer 2 d’Ethereum et d’autres blockchains alternatives comme Hyperliquid, où l’USDC représente 5 milliards de dollars.
Cette répartition montre comment l’offre d’USDC se diffuse sur divers écosystèmes, confortant son adoption et son rôle dans l’écosystème, et renforçant donc la confiance des investisseurs dans sa capacité à maintenir, voir augmenter, sa source de revenus principale.
Concernant les plateformes centralisées, l’USDT reste le stablecoin dominant. Prenons le cas de Binance, l’USDC représente environ un tiers des volumes, contre le double pour le stablecoin de Tether. Néanmoins, il faut noter que l’USDT n’est pas encore officiellement régulé en Europe, ce qui constitue un frein majeur à son utilisation et une porte de croissance pour l’USDC.
Si la croissance de l’USDC se poursuit sur 3 à 5 ans (usage en paiements globaux, paiements en actifs numériques, tokenisation d’actifs réels), le supply d’USDC pourrait atteindre 150 à 200 milliards de dollars dans les prochaines années. Avec un ratio de réserves conservateur de 55 à 60 % (actuellement 85 %), cela représenterait 4 à 5 milliards de dollars de rendement annuel, soit près de 3× plus qu’aujourd’hui, uniquement par la croissance de l’adoption et des taux favorables.
Ethena (ENA), le nouveau proxy stablecoin ?
Le succès de l’introduction en bourse de Circle, dont l’action CRCL a atteint jusqu’à +367 % du prix de lancement au plus haut, confirme l’appétit croissant des investisseurs pour le secteur des stablecoins. Dans un contexte où Circle atteint désormais une valorisation élevée et où Tether reste absent des marchés publics, Ethena est un candidat idéal pour être le “prochain proxy stablecoin”.
Ethena en bourse via StablecoinX
Ethena est l’émetteur d’USDe, le troisième plus grand stablecoin du marché avec une capitalisation supérieure à 7 milliards de dollars. En juillet 2025, Ethena a officialisé son projet d’entrée en bourse par fusion avec la SPAC américaine TLGY Acquisition Corp. L’entité résultante, StablecoinX, sera cotée au Nasdaq sous le ticker “USDE”.
Cette acquisition s’accompagne d’une levée de fonds d’environ 360 millions de dollars, impliquant notamment des acteurs comme Dragonfly, Pantera Capital, Polychain Capital, Galaxy Digital ou encore Wintermute. Plus précisément, voici les détails :
- 260 millions de dollars en cash apportés par les investisseurs institutionnels ;
- 70 millions de dollars en tokens ENA fournis par la fondation Ethena, cédés à la nouvelle entité en tant qu’apport en nature.
Dans la pratique, ces fonds seront utilisés immédiatement après la signature pour enclencher une stratégie d’achat de tokens ENA, au rythme de 5 millions de dollars par jour durant les 6 prochaines semaines. Les tokens ainsi acquis seront ensuite immobilisés de manière permanente au bilan de StablecoinX, rejoignant les ENA déjà transférés par la fondation.
StablecoinX opérera ainsi comme une holding cotée en bourse et un proxy public pour s’exposer au marché des stablecoins et à l’écosystème d’Ethena.
Le positionnement du ENA
Le modèle financier introduit par la structure StablecoinX aura un impact direct sur le token ENA d’Ethena. Tout d’abord, les 260 millions de dollars permettront d’acheter environ 390 millions de tokens ENA (au prix actuel de 0,67 dollar), soit un peu plus de 6 % de la quantité totale en circulation.
À cela s’ajoutent 110 millions de tokens ENA, soit environ 70 millions de dollars, qui seront également verrouillés dans la trésorerie de StablecoinX. Ainsi, ce sont environ 8 % de l’ensemble des ENA en circulation qui seront retirés du marché : un “float removal shock” d’une ampleur importante pour un tel projet.
Par ailleurs, à mesure que le prix de l’ENA augmente, la valorisation de StablecoinX (qui détient du ENA en trésorerie) augmente également, facilitant d’éventuelles levées de capitaux. On se retrouve dans un schéma similaire à celui de MicroStrategy avec le Bitcoin. Évidemment, cela a un effet boule de neige important en phase haussière, mais soulève des inquiétudes lors des périodes baissières pour les altcoins.
Conformité réglementaire avec l’USDtb
L’une des récentes annonces majeures d’Ethena a été le lancement du stablecoin USDtb aux États-Unis, positionné comme le premier stablecoin “compliant” avec le GENIUS Act. L’USDtb est un dollar numérique adossé à 100 % à des actifs sûrs et liquides (principalement des bons du Trésor américain tokenisés via le fonds BlackRock BUIDL), et émis depuis des infrastructures régulées (notamment via Anchorage Digital, première banque crypto américaine agréée OCC).
À la différence d’USDe, qui repose sur une approche synthétique et un modèle de rendement fondé sur les marchés dérivés crypto, USDtb se positionne comme un stablecoin institutionnel, conforme aux nouvelles exigences de supervision américaine : séparation stricte des réserves, attestation mensuelle, conformité KYC/AML et structure de garde réglementée.
Ce positionnement permet à Ethena d’adresser deux segments complémentaires, tout en devenant potentiellement le réseau principal pour les supporter (avec Converge) :
- Les utilisateurs crypto-natifs et DeFi, avec USDe et son modèle à haut rendement ;
- Les institutions financières, fonds, corporates, avec USDtb, solution stable, transparente, régulée, et éligible à la détention par des acteurs américains institutionnels.
Valorisation d’Ethena et comparatif avec Circle
La valorisation boursière de Circle s’établit actuellement à 42 milliards de dollars, après un pic à 66 milliards de dollars lors de l’ATH du cours du CRCL. En considérant un bénéfice net de 156 millions de dollars, cela correspond à un ratio P/E de 282. Ce chiffre est particulièrement élevé et témoigne de l’euphorie actuelle du marché pour les stablecoins, dont Circle est l’unique proxy existant pour s’y exposer.
Concernant Ethena, la valorisation de l’ENA est de l’ordre de 4,1 milliards de dollars. Les revenus du protocole ne sont pas les mêmes selon les fournisseurs de données ; nous décidons de prendre les informations de DefiLlama (les plus faibles), qui indiquent un bénéfice net de 114 millions de dollars annualisés. Autrement dit, cela donne un ratio P/E de 36.
En partant de ces différents constats et en tentant d’appliquer le modèle de valorisation de Circle à Ethena, on observe que : avec le ratio P/E de Circle, ENA aurait une capitalisation de 32 milliards de dollars.
Comme exposé plus haut dans cet article, le modèle de revenus de Circle dépend énormément des taux d’intérêts sur la dette américaine : une légère baisse (le consensus pour les mois à venir) entraînerait une chute importante des bénéfices de l’entreprise. Au contraire, les revenus d’Ethena sont fondés sur les funding rates des marchés dérivés et sont donc neutres face à la direction dans laquelle se dirige le marché.
Ainsi, dans la configuration actuelle, ENA se négocie sur des multiples énormément inférieurs à ceux de Circle. Cela peut se présenter comme une opportunité, notamment en considérant l’introduction prochaine en bourse, la croissance de l’USDe et de l’USDtb, le développement de Converge et le modèle économique d’Ethena.
Conclusion
L’IPO de Circle constitue un événement phare pour l’écosystème des stablecoins, inaugurant une nouvelle ère de légitimité et de croissance pour la finance digitale. Les stablecoins sont devenus un pont incontournable entre la finance traditionnelle et le monde crypto, permettant des transactions transfrontalières fluides, offrant l’accès au dollar dans les pays émergents, et favorisant l’inclusion financière à l’échelle mondiale.
Avec des volumes records et des réserves adossées à des montants significatifs de bons du Trésor américain, le marché des stablecoins semble prêt à poursuivre son expansion, soutenu par l’intérêt institutionnel croissant et la perspective de clarté réglementaire.
Cependant, des défis subsistent : le modèle économique de Circle, dépendant quasi-exclusivement du rendement des réserves (99 % des revenus), le rend vulnérable aux variations des taux d’intérêt. Si un contexte favorable peut soutenir voire augmenter ces revenus, tout durcissement monétaire ou obstacle réglementaire viendrait peser sur la rentabilité. L’évolution réglementaire, notamment via le GENIUS Act, sera déterminante pour la trajectoire du secteur à long terme.
En perspective, le marché des stablecoins affiche un potentiel considérable, avec une supply d’USDC au plus haut et une adoption croissante sur tous les réseaux blockchain. Avec plus de 60 000 milliards de dollars de cash en circulation dans le monde, on peut s’attendre à ce que les stablecoins fassent à la monnaie fiduciaire ce que l’Internet a fait aux journaux et l’email aux lettres.