Sonic (S) : la renaissance de Fantom (FTM) ou un simple mirage ?
28 février 2025

Le marché des layer 1 évolue rapidement : les tendances se succèdent, les capitaux migrent et l’intérêt des investisseurs suit des cycles imprévisibles. Après une longue période de désillusion, Fantom renaît sous le nom de Sonic et rebondit grâce à une refonte stratégique et au retour d’Andre Cronje, figure clé de la DeFi. Au-delà du narratif attractif et d’un système de points pour un airdrop, Sonic a-t-il réellement les fondamentaux pour s’imposer durablement ? Cette analyse explore les forces et faiblesses de Sonic face à la concurrence, en évaluant les catalyseurs, les risques et les enjeux autour de cette montée en puissance.
L’histoire du Fantom devenu Sonic
Pendant longtemps, Fantom (FTM) a été un acteur majeur de l’écosystème de la finance décentralisée (DeFi). La blockchain avait réussi à se démarquer dans la bataille des layer 1 grâce à sa compatibilité EVM et ses frais réduits, attirant ainsi une large communauté d’utilisateurs et de développeurs.
Entre 2020 et début 2022, la TVL de Fantom avait explosé pour atteindre plusieurs milliards de dollars, en grande partie grâce aux innovations apportées par le fondateur, Andre Cronje, l’un des pionniers et figures les plus influentes du secteur de la DeFi.
Néanmoins, le précédent bear market a freiné l’ascension de Fantom. Que cela soit en raison du départ d’Andre Cronje, du désintérêt des utilisateurs pour la DeFi, de l’effondrement de certains protocole, du manque de stablecoins natifs ou de l’émergence de solutions concurrentes et beaucoup plus en tendance : Fantom a perdu progressivement son attractivité et son activité.
Face à ce constat, le rebranding en Sonic a été une nécessité plus qu’un choix. En 2024, l’équipe a pris le pari de pivoter d’une blockchain simplement rapide et peu coûteuse vers une architecture complètement repensée, avec une exécution parallèle, une intégration native des stablecoins, un modèle économique repensé et un écosystème de nouveau attractif pour les développeurs.
Architecture et technologie de Sonic
Avec le passage de Fantom à Sonic, la blockchain n’a pas seulement changé de nom. Elle s’est également dotée d’une nouvelle architecture adaptée aux besoin des applications de DeFi modernes. L’objectif est clair : proposer une blockchain ultra-performante, compétitive et attractive pour les développeurs et les utilisateurs.
Les éléments clés à retenir
- Nouvelle infrastructure : Sonic n’est plus une simple blockchain rapide, mais un Layer 1 optimisé avec exécution parallèle des transactions (10 000 TPS), une finalité rapide (720 ms) et des coûts par transaction inférieurs à 0,01 dollar.
- Refonte du modèle économique : introduction d’un Gas Fee Monetization Program, permettant aux développeurs de capter jusqu’à 90 % des frais de transaction, une approche unique par rapport aux autres EVM.
- Bridging sécurisé : déploiement de Sonic Gateway, un bridge Ethereum avec un fail-safe de 14 jours, pour éviter les catastrophes de liquidité vécues avec Multichain.
- Intégration native des stablecoins : collaboration avec Circle et Wormhole pour garantir une liquidité fiable sur le réseau.
- Retour d’Andre Cronje : figure emblématique de la DeFi, qui joue un rôle clé dans la construction et la supervision de la nouvelle histoire de Sonic.
Un L1 ultra-performant
Sonic est une blockchain qui s’inscrit dans la catégorie des layer 1 ultra rapide et performante. Le réseau promet une capacité de traitement de 10 000 TPS, une finalité de transactions de 720 ms et des frais de réseau inférieurs à 0,01 dollar.
Ces performances sont assurés grâce à un changement majeur : l’introduction d’un moteur d’exécution parallèle des transactions. D’une certaine manière, Sonic est plutôt un Directed Acyclic Graph (DAG) qu’une blockchain traditionnelle. Ce choix technologique permet une optimisation des transactions et améliore leur rapidité de traitement.
Comparaison des temps de finalité :
- Ethereum : ~12 secondes
- Arbitrum / Optimism : ~2-3 secondes
- Sei v2 : ~390 ms
- Hyperliquid : ~200 ms
- Sonic : 720 ms
Cette rapidité positionne Sonic comme un concurrent direct des nouvelles blockchains spécialisées en haute fréquence, notamment Sei, Hyperliquid et Monad.
Gas Fee Monetization
L’un des aspects les plus novateurs de Sonic réside dans son Gas Fee Monetization Program. Contrairement à la plupart des Layer 1 où les frais de transaction sont brûlés ou captés par les validateurs, Sonic redistribue jusqu’à 90 % des frais aux développeurs des applications utilisées.
Pourquoi est-ce important ?
- Ce modèle incite fortement les développeurs à construire et à attirer des utilisateurs sur Sonic.
- Il favorise un écosystème autosuffisant, réduisant la dépendance aux subventions ou incentives temporaires.
- Les protocoles peuvent redistribuer ces revenus à leurs utilisateurs, améliorant l’attractivité des dApps.
Cependant, ce modèle entraîne une baisse de la pression déflationniste sur l’offre du token S, puisque moins de tokens sont brûlés. De plus, il réduit la part des frais allouée aux validateurs, ce qui peut affecter la décentralisation du réseau. Sonic mise néanmoins sur l’adoption massive pour compenser ces effets.
NDLR : Ce modèle est souvent présenté comme une innovation majeure, mais il s’inspire largement des mécanismes développés par Berachain, qui mise également sur le partage des frais pour inciter les développeurs.
Bridges et stablecoins natifs
L’un des problèmes majeurs rencontrés par Fantom était le manque de bridges sécurisés et l’absence de stablecoins natifs, ce qui compliquait les transferts de valeur et limitait la liquidité on-chain. Sonic a répondu à ces problématiques avec plusieurs améliorations clés :
- Sonic Gateway : un bridge sécurisé avec Ethereum, intégrant un fail-safe de 14 jours pour prévenir les risques d’exploit ou de vol de fonds (contrairement aux solutions passées comme Multichain).
- Stablecoins natifs : Sonic intègre désormais USDC via Circle et Wormhole, garantissant une liquidité fiable et transparente pour la DeFi.
Ces améliorations permettent une meilleure intégration avec l’écosystème Ethereum et assurent un accès facilité aux capitaux, un élément clé pour l’attractivité de Sonic auprès des développeurs et investisseurs.
Une opportunité temporaire ou durable ?
L’intérêt des investisseurs pour Sonic est indéniable. Il suffit de regarder l’indicateur mindshare de Kaito (la part d’attention occupé par le projet au sein de la communauté) : celui-ci est en hausse parabolique depuis le début du mois de janvier. Autrement dit, de plus en plus d’investisseurs parlent de Sonic sur les réseaux sociaux.
D’un point de vue des métriques on-chain, l’intérêt est également indéniable :
- La TVL a dépassé les 750 millions de dollars (24 février), avec des afflux de liquidité significatifs.
- Le token S de Sonic affiche une forte résilience, malgré une dynamique baisière sur le marché des altcoins.
- Les développeurs migrent vers l’écosystème grâce aux incitations directes via le Gas Fee Monetization.
Mais ces indicateurs ne garantissent pas une adoption durable. Effectivement, Sonic a été clair dès le lancement : le projet propose un airdrop de 190 500 000 S pour inciter les utilisateurs et les développeurs à venir sur le réseau. Au prix actuel du token, cela représente un peu plus de 100 millions de dollars.
Il existe deux systèmes de points : Sonic Points et Sonic Gems. Le premier s’adresse aux utilisateurs et se présente comme un programme de distribution de points assez classique, en fonction de l’activité sur le réseau. Le second s’adresse aux développeurs et est focalisé sur la capacité des projets à attirer des utilisateurs et de la liquidité.
De manière assez logique, les récents afflux de liquidités ayant permis à la TVL de bondir (de quelques centaines de milliers de dollars à plus de 700 millions de dollars) sont motivés par les récompenses potentielles à venir en juin 2025 lors de l’airdrop. Que restera-t-il à l’issue de cette distribution ?
Sonic face à la concurrence
Comparatif du secteur
Le succès récent de Sonic est évident, nous l’avons mis en avant dans cette dernière section. Certes, il existe une opportunité d’airdrop qui mérite d’être saisie, mais il est intéressant de se poser la question de la viabilité sur le long terme. Actuellement, le marché des layer 1 et des blockchains ultra-performante est extrêmement compétitif et dense.
Critères | Sonic | Monad | MegaETH | Berachain | Hyperliquid | Sei |
---|---|---|---|---|---|---|
État d’avancement | Déjà en mainnet | Toujours en testnet | Pas encore lancé | Déjà en mainnet | Déjà en mainnet | Déjà en mainnet |
Performance TPS | 10 000 TPS | 10 000 TPS | 100 000+ TPS | ~1 000 TPS | 100 000+ TPS | ~28 000 TPS |
Finalité des transactions | 720 ms | 1 sec | 1-10 ms | 1 sec | > 1 sec | 390 ms |
Modèle économique | Gas Fee Monetization (90% redistribué) | Frais classiques | Frais classiques | Proof-of-Liquidity | Buyback de tokens via l’activité du DEX | Frais classiques |
Problème potentiel | Soutenabilité du modèle économique | Unlocks de tokens VC à venir | Une dépendance à Ethereum | Pression de revente des incentives | Un lancement de l’HyperEVM controversé et des attentes élevées | Un écosystème trop fermé, peu de liquidité et d’utilisateurs |
Comment naviguer avec Sonic ?
Bien que Sonic bénéficie d’une sorte de first-mover advantage sur ce segment - puisque le réseau est déjà lancé - il ne dispose pas des mêmes niveaux de financement et de support VC que ces nouveaux entrants. Néanmoins, des cas comme Hyperliquid ont prouvé que ça n’était pas primordial et le soutien d’une figure comme Andre Cronje est un atout indéniable.
L’histoire des layer 1 - et des layer 2 - nous a montré que la liquidité migre rapidement vers les nouvelles opportunités à fort rendement. Les investisseurs en quête des opportunités les plus incitatives se déplacent plus vite qu’un projet n’est capable de réagir.
Pour le moment, le lancement du testnet de Monad n’a pas ralenti la croissance de la TVL sur Sonic (ce qui est plutôt une bonne nouvelle) et il faudra surveiller l’impact du lancement de MegaETH et de l’envergure des incitations qui seront proposées. Tant que Sonic demeure la meilleure contrepartie des chasseurs d’airdrops, ils y resteront.
Concernant l’adoption sur le long terme, il est certain que le Gas Fee Monetization est un catalyseur pour l’arrivée de développeurs sur le réseau. Néanmoins, rien n’indique pour le moment que cela suffit à les retenir une fois que d’autres blockchains proposeront des incitations concurrentes et surtout, encore une fois, ce sont les utilisateurs qui ont le dernier mot.
Conclusion
Sonic a vraisemblablement réussi sa transformation et s’est repositionné comme un layer 1 performant et compétitif. Les fondamentaux technologiques sont présents : une rapidité d’exécution, un modèle économique différenciant et une liquidité déjà présente qui offrent un avantage significatif sur la concurrence.
Néanmoins, l’enjeu principal pour Sonic est le même que n’importe quel réseau dans une période d’incitation économique forte (système de points en prévision d’un airdrop), à savoir de maintenir son attractivité face aux prochaines vagues de layer 1 et aux nouveaux modèles économiques qui pourraient détourner la liquidité et les développeurs.
L’écosystème de Sonic repose en grande partie sur l’activité DeFi et l’airdrop en cours, ce qui en fait un environnement dynamique mais aussi soumis aux tendances du marché. Pour le moment, il reste attractif pour les chasseurs d’airdrops et il n’y a pas de raisons apparentes de jouer contre la tendance.
Dans une prochaine analyse, nous vous proposerons une insight sur l’airdrop et des stratégies claires pour accumuler des points en vue de la distribution prochaine de 190 millions de tokens S.