17 octobre 2025
Le marché crypto s’enfonce dans le rouge et le Bitcoin vient de casser son principal support, remettant potentiellement en cause la tendance haussière des dernières semaines. Pendant ce temps, l’or et l’argent atteignent des sommets historiques, signe que les investisseurs fuient le risque. Aux États-Unis, la liquidité s’épuise, les banques montrent des signes de faiblesse et la Fed est au pied du mur. Dans cet article, on revient sur les causes du stress actuel, les scénarios possibles pour les prochaines semaines et la meilleure façon d’aborder cette phase d’incertitude.
Ce n’est une surprise pour personne : le marché crypto plonge ce vendredi. Le Bitcoin a décroché de plus de 17 % depuis son plus haut du mois et vient de casser la zone charnière des 107 500 - 108 500 dollars, celle que nous signalions hier dans la newsletter du BlockNote comme le niveau d’invalidation à surveiller. En dessous, la structure haussière de moyen terme est rompue et le marché bascule dans une zone de flou.
Pendant ce temps, l’or et l’argent atteignent des sommets historiques : respectivement 4 340 $ et 54,3 $ l’once. Des gens se ruent même aux guichets les plus proches pour acheter de l’or physique. Ce mouvement de fuite vers les valeurs refuges est symptomatique d’un changement de régime : les investisseurs ne se couvrent plus contre l’inflation, mais contre un potentiel risque systémique.
Aux États-Unis, la combinaison d’une contraction de la liquidité, de signaux de stress dans les banques régionales et d’un marché du crédit qui se grippe met la Fed face à ses limites. L’enjeu n’est plus de “piloter l’inflation”, mais d’éviter une éventuelle crise économique et de financement.
Dans cet article, on fait le point sur la situation économique américaine, sur les implications pour les marchés financiers, sur les niveaux techniques à surveiller sur Bitcoin et surtout, sur la manière de réagir à cette situation dans une phase d’incertitude maximale.
Depuis plusieurs mois maintenant, nous sommes dans une phase de Quantitative Tightening menée par la Fed, dans un objectif de restreindre l’inflation. Le problème actuel est que le système est à bout de souffle et que les impacts commencent à se faire réellement sentir.
D’abord, il faut parler du Reverse Repo Facility (RRP). Pour faire simple, il s’agit du principal réservoir de liquidité excédentaire de la Fed. Alors qu’il représentait plus de 2 500 milliards à son pic en décembre 2022, au début de la période de Quantitative Tightening, il s’est depuis complètement vidé et il ne reste qu’environ 4 milliards de dollars dans ce programme.
Autrement dit, le matelas de sécurité pour défendre le système financier américain n’existe plus. Cette liquidité excédentaire avait permis à la Fed de mener sa politique de resserrement monétaire en limitant les risques de crise majeure. Ainsi, nous sommes dans une situation où chaque dollar est un dollar de moins disponible pour défendre le système.
Dans le même temps, les réserves des banques auprès de la Fed sont tombées en dessous de 3 trillions de dollars, un niveau que même l’institution considère comme la limite indiquant une raréfaction des liquidités. En bref, cela signifie que les banques ont plus de difficultés à emprunter de l’argent.
C’est ici qu’intervient le Standing Repo Facility (SRF). Pour faire simple, il s’agit d’un levier d’urgence mis à disposition par la Fed pour les banques ne parvenant plus à trouver des liquidités sur les marchés interbancaires classiques. Or, depuis quelques jours, l’utilisation du SRF a explosé.
Enfin, deux ans après la faillite de SVB et dans un contexte sensiblement similaire, les banques régionales américaines inquiètent de nouveau. Zions Bancorporation a révélé une perte de 50 millions de dollars sur des crédits non remboursés, de même pour Western Alliance qui a engagé des poursuites pour fraude contre un de ses créanciers.
Leurs actions en bourse ont dégringolé et l’indice KBW des banques régionales a chuté de 6,3 % sur la session de jeudi. Une situation qui fait écho à la phrase prononcée par Jamie Dimon, CEO de JP Morgan, suite à leur perte de 170 millions de dollars au troisième trimestre en lien avec la faillite de Tricolor : “Quand on voit un cafard, il y en a probablement d’autres, donc tout le monde doit être prévenu.”
Derrière ces signaux, c’est toute la mécanique de financement américaine qui se grippe lentement. Le marché interbancaire montre des signes de tension : les taux de repo, censés refléter le coût du cash à court terme, commencent à diverger, et certaines institutions sont forcées de se financer auprès de la Fed via le SRF plutôt que sur le marché.
La politique de Quantitative Tightening menée par la Fed ces dernières années, dans le but unique de contenir l’inflation, commence à sérieusement montrer ses limites. Le RRP est désormais vide et les liquidités ont été comprimées au point de fragiliser les maillons faibles (banques régionales, shadow banking, crédits commerciaux).
Évidemment, nous ne sommes pas encore dans un scénario de crise. Néanmoins, on comprend que la Fed est au pied du mur et que Jerome Powell n’a plus le luxe d’attendre. Historiquement, ce genre de configuration ne dure pas longtemps : soit la Fed intervient rapidement pour détendre le système, soit le stress s’étend à d’autres compartiments du marché.
C’est pour cette raison que les prochaines semaines sont critiques. La réunion du FOMC du 29 octobre est probablement le vrai catalyseur de marché. Le marché estime désormais une probabilité de 65 % que la Fed annonce une baisse des taux de 25 bps, permettant de détendre la situation. D’ici là, chaque signal de tension sera une pression supplémentaire sur Powell pour accélérer le pivot.
D’un point de vue technique, le cours du BTC a chuté (pour le moment) sous la zone des 107 500 - 108 500 dollars évoquée dans notre newsletter d’hier. Cela signifie que la structure haussière entamée depuis le rebond du mois d’avril est potentiellement rompue et que nous entrons dans une zone d’incertitude complète.
Dans ce contexte, on distingue trois zones clés à surveiller :
Tant que le prix du BTC reste enfermé entre 98 000 $ et 107 000 $, nous n’aurons pas de réponse à cette question : est-ce le début d’une phase baissière ou une continuation de la tendance haussière ?
À l’image de la situation financière aux États-Unis, le marché des cryptos est compressé et proche de la cassure. En considérant le contexte évoqué plus haut dans cet article, la décision finale est probablement entre les mains de la Fed et de Jerome Powell : vont-ils, une nouvelle fois, voler au secours de l’économie américaine ?
Dans la situation actuelle, je reste principalement positionné en stablecoins malgré les opportunités de prix intéressantes. Ce n’est pas un appel à la prudence pour le principe, c’est une question d’espérance de gain : entre 98 000 $ et 107 000 $, il n’y a pas de setup directionnel clair et le marché peut clairement aller dans n’importe quelle direction.
D’autant plus qu’à court terme, on observe que des poches importantes de liquidités se sont accumulées depuis ce matin autour de 104 000 $ et entre 103 700 $ et 102 500 $, tandis que les shorts sont concentrés entre 105 500 $ et 108 000 $. Autrement dit, le marché pourrait “nettoyer” des deux côtés avant de choisir une direction claire.
Dans le cas où le BTC reprend les 107 000 $ proprement, avec volume, un retour à la normale des fundings et un open interest qui remonte, alors je redeviendrai preneur de risque. À l’inverse, si on casse 98 000 $ à la baisse, je préfère laisser passer le mouvement, car cela indiquerait clairement le début d’une tendance baissière.
Pour le moment, le déroulement de la journée est plutôt encourageant et le marché affiche des caractéristiques classiques de période haussière : la chute est rapidement survendue et les hausses prennent du temps avant d’être surachetées.
La réponse sur la situation viendra probablement encore une fois de Jerome Powell, certainement lors de la réunion du FOMC du 29 octobre prochain.
Ma vision est que nous sommes à la fin du cycle de resserrement monétaire mené par la Fed et que cette dernière n’a plus le choix : elle devra mettre fin au QT et enclencher une nouvelle phase d’assouplissement (QE) pour réinjecter de la liquidité.
Mais tant que cette décision n’est pas formalisée, le marché reste dans une zone d’incertitude où il est difficile de se positionner. Pour conclure, il me semble que le marché crypto n’a pas dit son dernier mot et, d’après moi, il devrait consolider quelques jours avant de repartir en tendance haussière, plutôt que l’inverse.
Néanmoins, il ne faut pas oublier que d’autres éléments peuvent avoir un impact sur le marché. Évidemment, Donald Trump reste imprévisible et chacune de ses annonces fait réagir instantanément le marché.
Mais surtout, les tensions commerciales entre les États-Unis et la Chine : Trump a déclaré aujourd’hui que les tarifs douaniers de 100 % sont temporaires, tandis que la réunion entre les deux présidents aura lieu d’ici moins de 2 semaines.