Ethereum (ETH) : Une présentation complète de la première blockchain programmable
5 septembre 2024

Ethereum est la première blockchain à implémenter les smart contracts, la rendant programmable et lui permettant d'accueillir des applications décentralisées. Découvrons ensemble ce qu'est Ethereum, sa thèse, son équipe, son architecture technologique, son écosystème et son état d'adoption.
Les informations principales
- Lancement en 2015 : Créé par Vitalik Buterin, Ethereum a introduit le concept de smart contracts et d'applications décentralisées (dApps).
- Transition vers Proof-of-Stake (PoS) : Le passage d'Ethereum en septembre 2022, du Proof-of-Work (PoW) au Proof-of-Stake (PoS), améliore la scalabilité et réduit l'empreinte énergétique.
- Solidity : Le langage de programmation natif d'Ethereum, utilisé pour développer des smart contracts.
- Écosystème dynamique : Ethereum héberge un large éventail de projets, incluant des applications DeFi, des NFT, et des DAO.
Introduction
Ethereum est un protocole de blockchain ouvert et décentralisé, conçu pour permettre à n’importe qui de construire des applications décentralisées (dApps). Lors du lancement en 2015, Ethereum représente une véritable révolution dans le paysage des cryptomonnaies grâce à une innovation majeure : la programmabilité de la blockchain.
Cette programmabilité est rendue possible par les smart contracts, des morceaux de code informatique qui peuvent être enregistrés dans la blockchain et qui s’exécutent automatiquement lorsque des conditions pré-définies sont remplies. Ainsi, ils permettent aux développeurs de construire des applications complexes et sophistiquées sur Ethereum.
En quelques années, Ethereum a ouvert la voie à la création d’un nouveau Web, aussi appelé “Web3”. Cet écosystème émergent d’applications se distingue par ses valeurs de décentralisation, mais aussi de communauté, de non censurabilité, de sécurité et de respect des données personnelles des utilisateurs.
La cryptomonnaie native de l’univers d’Ethereum est baptisée l’Ether (ETH). À date de la rédaction (août 2024), elle se trouve à la deuxième position des cryptomonnaies les plus capitalisées du marché, derrière le célèbre Bitcoin (BTC).
Thèse
Revenons aux premières années de l’industrie. Bitcoin a prouvé qu'il était possible de créer un registre numérique distribué capable d'exécuter, de sécuriser et d'enregistrer des transactions de manière décentralisée. Ainsi, la majorité des nouvelles blockchains se sont uniquement concentrées sur les paiements numériques, en apportant des modifications techniques mineures mais sans réellement s'éloigner de cette fonction première.
En revanche, Ethereum est apparu avec une vision radicalement différente : faire de la blockchain une plateforme programmable, ouvrant ainsi la voie à une multitude d'autres applications. Là où Bitcoin peut être comparé à une calculatrice, Ethereum se positionne comme un smartphone, capable de gérer des tâches bien plus complexes et diversifiées. Au cœur de cette thèse se trouvent des innovations technologiques clés, telles que les smart contracts et la machine virtuelle d'Ethereum (EVM), qui permettent de créer et d'exécuter des applications décentralisées.
Depuis son lancement, la thèse d'Ethereum a évolué, mais elle reste animée par une ambition constante : construire un écosystème dynamique d'individus, d'organisations et d'applications, tous interconnectés et se développant sur une base technologique commune. Cet écosystème est conçu pour être flexible, évolutif et capable de s'adapter aux besoins en constante évolution de l'économie numérique mondiale, tout en respectant les principes de décentralisation, de transparence et de sécurité.
Les figures importantes
Vitalik Buterin
L'histoire d'Ethereum débute dans l’esprit d’un jeune développeur russo-canadien du nom de Vitalik Buterin. Né de parents développeurs, il se passionne rapidement pour les mathématiques et le développement informatique. En 2011, il découvre le Bitcoin pour la première fois par le biais de son père et le coup de coeur est immédiat.
À seulement 17 ans, il comprend déjà les enjeux de cette innovation et commence à s’impliquer, d’abord en rédigeant des publications sur des forums spécialisés, puis en co-fondant le blog Bitcoin Magazine. Deux années plus tard, il voyage à travers le monde entier pour rencontrer des développeurs de Bitcoin et leur faire part de ses idées d’améliorations potentielles pour le protocole.
D’après Vitalik, la blockchain Bitcoin fait face à une limitation principale : elle n’est pas programmable. Néanmoins, ses pairs ne sont pas d’accord avec lui et face à leurs refus, il décide finalement de lancer sa propre blockchain, Ethereum.
À la fin de l’année 2013, il formule toutes ses idées dans un premier document qu’il partage à une trentaine d’individus. Après avoir reçu le soutien d’informaticiens et d’entrepreneurs comme Gavin Wood, Mihai Alisie ou encore Charles Hoskinson, Vitalik Buterin publie en janvier 2014 la version finale d’un livre blanc.
La Fondation Ethereum
« Notre vision d'Ethereum est celle du jardin infini. Ethereum est plus qu'une technologie, c'est un écosystème diversifié d'individus et d'organisations qui construisent et se développent au côté d’un protocole ».
La Fondation Ethereum (EF) est une organisation à but non lucratif dédiée à soutenir le développement de l’écosystème d’Ethereum au sens large. Elle a été lancée en 2014 par Vitalik Buterin et Gavin Wood avec l’intention de mettre les efforts nécessaires pour faire comprendre la valeur et la philosophie d’Ethereum pour le monde.
Il est important de noter que la Fondation Ethereum n’est pas une entreprise, c’est-à-dire qu’elle n’exerce aucun contrôle direct sur la blockchain. Toutefois, son rôle dans la direction et le développement d’Ethereum est primordial, en permettant un espace de discussion sur l’avenir du protocole et de rencontre pour les contributeurs.
Depuis sa création, la Fondation Ethereum a bien changé mais l’ambition demeure la même : supporter le développement de protocoles, faire grandir l’écosystème et œuvrer à la démocratisation d’Ethereum. Aujourd’hui, il faut noter que de nombreuses autres organisations contribuent également au financement des développeurs et des contributeurs.
En l’espace de dix années seulement, Ethereum est passé d’une jeune pousse fragile à un vaste jardin (très) fertile. Néanmoins, le chemin vers la maturité est encore long et la Fondation Ethereum est toujours présente pour cultiver Ethereum aux côtés de tous et surtout, s’assurer que le jardin demeure un bien public, dirigé par personne et utile pour tous.
Levées de fonds et financement
Après avoir publié la première version du whitepaper d’Ethereum, l’équipe décide d’organiser une campagne de financement (Initial Coin Offering, ou ICO) dont le succès est immédiat. Pas moins de 31 000 BTC (environ 18 millions de dollars à l’époque) sont récoltés, en échange de 60 millions d’Ether (ETH). Pour information, les 12 millions d’ETH restants sont distribués à la Fondation Ethereum.
Architecture et technologie
L’architecture d’Ethereum repose sur une structure complexe et innovante, bien différente du reste des blockchains de l’écosystème. Alors que la majorité des initiatives étaient uniquement centrées sur des réseaux de paiements numériques, Ethereum a bouleversé l’écosystème en introduisant la programmabilité. Celle-ci est assurée par plusieurs éléments technologiques complexes, chacun jouant un rôle essentiel dans le fonctionnement et l'efficacité de la plateforme.
Les blocs d’Ethereum
Comme pour la majorité des blockchains, les blocs d’Ethereum sont des lots de transactions accompagnés d’un hachage du bloc précédent dans la chaîne. Cette organisation permet d’assurer une continuité en reliant les blocs entre eux, empêchant également les tentatives de fraude.
La durée de validation d’un bloc, appelée “slot”, est exactement de 12 secondes sur la blockchain Ethereum. Même si des dizaines, voire des centaines, de transactions sont proposées chaque seconde par les utilisateurs, il est nécessaire de conserver un délai suffisamment important entre chaque bloc pour que les validateurs puissent s’accorder sur la validité des transactions.

La validation des blocs permet à la blockchain Ethereum de passer d’un état à un autre. Néanmoins, cet état n’est pas un élément arbitraire. Au contraire, il est baptisé le “World State” et comprend des informations cruciales sur le réseau. On y retrouve les comptes d’utilisateurs avec leurs soldes en Ether, mais également en autres cryptomonnaies, ainsi que les informations concernant l’utilisation des smart contracts et des applications associées.
Une dernière remarque importante est que les blocs eux-mêmes sont limités en taille. Chaque bloc a une taille cible de 15 millions de gas, pouvant atteindre jusqu’à 30 millions de gas. Celle-ci peut être ajustée à la hausse ou à la baisse par un facteur de 1/1024 par rapport à la limite de gas du bloc précédent.
Ce point est important parce qu’il garantit que les blocs ne peuvent pas être arbitrairement grands. Si c’était le cas, les nœuds complets les moins performants cesseraient progressivement d'être en mesure de suivre le réseau en raison des exigences en matière d'espace et de vitesse.
Les noeuds Ethereum
En tant que réseau de blockchain décentralisé, Ethereum repose sur différents types de nœuds pour maintenir un haut niveau de sécurité, de fiabilité et d’accessibilité. Pour qu'une application puisse interagir avec la blockchain Ethereum, elle doit se connecter à un nœud Ethereum. La connexion à un nœud permet de lire les données de la blockchain et d'envoyer des transactions au réseau.
Les nœuds Ethereum sont des ordinateurs exécutant un logiciel, aussi appelé client Ethereum. Un client est une implémentation d'Ethereum qui vérifie toutes les transactions dans chaque bloc, assurant ainsi la sécurité du réseau et l'exactitude des données.

Les principaux types de nœuds Ethereum sont les nœuds complets, les nœuds d'archive et les nœuds légers, chacun ayant un rôle spécifique. Voyons ensemble les principales différences entre eux.
- Les nœuds complets (full nodes) jouent un rôle crucial au sein d’Ethereum en vérifiant les transactions et en validant les blocs du réseau un par un, avant de télécharger une nouvelle version de l’état de la blockchain. Par ailleurs, les nœuds complets conservent une copie locale des données récentes, généralement les 128 derniers blocs, et suppriment les données plus anciennes pour économiser de l'espace disque.
- Les nœuds d'archive sont une extension des nœuds complets. Alors qu'un nœud complet peut supprimer certaines données anciennes pour économiser de l'espace, un nœud d'archive conserve toutes les données historiques depuis le bloc de genèse. Cela permet de reconstruire l'état de la blockchain à n'importe quel point de son histoire. Les besoins en stockage de ces nœuds sont énormes, atteignant des téraoctets de données, ce qui les rend moins accessibles pour l'utilisateur moyen. Ils sont néanmoins essentiels pour des services comme les explorateurs de blocs, les fournisseurs de portefeuilles, et les entreprises d'analytique de la chaîne.
- Les nœuds légers sont conçus pour fonctionner avec des ressources limitées, comme une bande passante faible ou un matériel moins puissant. Plutôt que de télécharger tous les blocs, ces nœuds ne récupèrent que les en-têtes de blocs, qui contiennent des résumés des contenus des blocs. Les nœuds légers permettent aux utilisateurs de participer au réseau Ethereum sans avoir à gérer les exigences matérielles d'un nœud complet. Même s'ils ne participent pas au consensus (ils ne peuvent donc pas être validateurs), ils offrent un accès sécurisé et fonctionnel à la blockchain.
Le consensus de Proof of Stake (PoS)
Au lancement en 2014, la blockchain Ethereum reposait sur un mécanisme de consensus de Proof of Work (PoW). Cependant, face aux problèmes de scalabilité, les développeurs d’Ethereum ont décidé d’opérer une transition vers un mécanisme de Proof of Stake (PoS). Imaginée en 2020, celle-ci a finalement eu lieu lors de la mise à jour "The Merge" en septembre 2022.
Le Proof of Stake implémenté sur Ethereum repose sur plusieurs éléments. D’abord, la validation des blocs (et donc des transactions) par les nœuds nécessite de déposer 32 ETH dans un smart contract de staking. Ce dépôt joue un rôle majeur : assurer la protection du réseau. En effet, comme il existe un mécanisme appelé “slashing”, les validateurs malveillants risquent de perdre une partie ou la totalité de leurs ETH stakés s’ils ne respectent pas les règles.
Durant chaque “slot” (espacé de douze secondes), un validateur est choisi au hasard pour proposer un bloc. Il est chargé de regrouper les transactions, de les exécuter et de déterminer le nouvel état d’Ethereum (i.e. World State, voir section précédente). Ensuite, le validateur intègre ces informations dans un bloc et les transmet aux autres validateurs.
Les autres validateurs sont chargés d’exécuter les transactions pour s’assurer qu’ils sont d’accord avec la modification de l’état. Ils peuvent soit valider le bloc et l’ajouter à leur propre base de données, soit le refuser et ajouter le bloc le plus soutenu par le consensus global des validateurs.
La Machine Virtuelle Ethereum (EVM)
Pour construire une blockchain programmable, sur laquelle il est possible d’intégrer des morceaux de code informatique exécutables, il est primordial de mettre en place un environnement de programmation propre à Ethereum. Dans le monde de l’informatique, c’est ce qu’on appelle une machine virtuelle.
La machine virtuelle d’Ethereum (aussi appelée EVM pour Ethereum Virtual Machine) est au cœur du fonctionnement du protocole. Elle agit comme un environnement d'exécution universel, spécifiquement conçu pour exécuter les opérations liées aux smart contracts. En quelque sorte, l’EVM peut être considérée comme le cerveau d’Ethereum.

Pour comprendre le fonctionnement et le rôle essentiel de l’EVM sur Ethereum, il est important de rappeler quelques bases. La blockchain Bitcoin est souvent présentée comme un registre numérique distribué. En effet, c’est un registre puisqu’il recense chacune des transactions effectuées sur le réseau et actualise continuellement l’état des soldes en bitcoins de chacun des utilisateurs.
Dans le cas d’Ethereum, les choses sont différentes. Puisqu’il est possible d’effectuer des opérations plus sophistiquées grâce aux smart contracts, le calcul de l’état de la blockchain est particulièrement complexe (i.e. World State, voir la section sur les blocs). Cela implique de vérifier les montants en différentes cryptomonnaies des utilisateurs, mais également ceux des applications décentralisées et des smart contracts. Ainsi, Ethereum n’est pas considéré comme un registre distribué, mais plutôt comme une machine d’état distribuée.
À chaque fois qu’un nouveau bloc est validé, il est important que tous les nœuds du réseau Ethereum mettent à jour l’état de la blockchain. Toutefois, cela nécessite des calculs relativement lourds et surtout très précis, puisqu’une infime erreur entraînerait une modification radicale de toute la blockchain.
De ce fait, il est primordial d'avoir une unité centrale capable de réaliser ces calculs pour les nœuds d’Ethereum. Vous l’avez compris, c’est le rôle de la machine virtuelle d’Ethereum : l’ordinateur qui effectue toutes ces opérations à chaque nouveau bloc.
Depuis sa création en 2014, la machine virtuelle d’Ethereum a connu de nombreuses modifications et a été déclinée dans divers langages de programmation. Encore aujourd’hui, elle demeure une référence pour les environnements d’exécution des blockchains plus récentes, qui cherchent souvent à y être compatibles.
Le standard ERC-20
Le standard ERC-20 est une suite d’outils et de fonctions techniques visant à encadrer la construction de tokens sur la blockchain Ethereum. Pour comprendre son intérêt, il faut revenir en 2015, à une époque où il n’existait aucune règle pour accompagner la création de nouveaux tokens sur la blockchain.
Évidemment, cela a rapidement entraîné des problèmes et des dérives :
- Une compatibilité difficile au sein de l’écosystème. Les tokens créés respectaient des règles différentes et étaient conçus avec des codes propres à chaque développeur, rendant particulièrement difficile leur utilisation au sein des portefeuilles ou des applications décentralisées ;
- Une fragmentation de l’écosystème. L’absence de normes communes rendait extrêmement difficile l’adoption des tokens par les développeurs et les utilisateurs, séparant l’écosystème en fonction des méthodes utilisées pour coder et freinant ainsi le développement et l’adoption de l’écosystème ;
- Des risques pour les utilisateurs. En toute logique, cette jungle sans règles a favorisé le développement de tokens malveillants, dont l’unique but était de subtiliser les fonds des utilisateurs.
Face à ce chaos, la Fondation Ethereum a joué son rôle de protectrice de l’écosystème et a introduit la norme ERC-20. Proposée à la fin de l’année 2015, celle-ci visait à apporter un standard commun pour la création de tokens sur Ethereum.
Pour être conforme à cette norme, un token ERC-20 doit suivre une série de règles et implémenter certaines fonctions essentielles dans son code. De cette manière, il est devenu beaucoup plus simple pour les développeurs de les intégrer dans les portefeuilles, les plateformes d’échange ou les applications décentralisées.
Voici quelques fonctions essentielles pour un token ERC-20 :
- TotalSupply : fournit des informations sur l'offre totale de tokens ;
- BalanceOf : indique le solde du compte du propriétaire du token ;
- Transfer : exécute les transferts de tokens vers des adresses spécifiées ;
- TransferFrom : permet les transferts à partir d'une adresse spécifiée ;
- Approve : permet aux débiteurs de retirer des tokens ;
- Allowance : renvoie les tokens du débiteur au propriétaire.
D’autres attributs optionnels peuvent également être ajoutés :
- Name : Le nom du token ;
- Symbol : Le ticker du token ;
- Decimals : Indique la plus petite unité d’échange de ce token après la virgule.
Pour la petite histoire, l’instigateur de cette norme ERC-20 est Fabian Vogelsteller, l’un des principaux développeurs d’Ethereum. Il a soumis cette proposition via la page GitHub d’Ethereum, où il a laissé un "Ethereum Request for Comment", le 20ème de la page, d’où le nom ERC-20.
La roadmap d’Ethereum
Cela est relativement clair en lisant ces lignes, Ethereum est un protocole qui évolue énormément, rythmé par les avancées de l’industrie, la recherche et le développement des projets de son écosystème.
Cela se traduit directement dans la roadmap du projet, la « feuille de route » permettant d’améliorer, de démocratiser et, plus généralement, de développer le protocole. Depuis quelques années, celle-ci a bien changé et aborde désormais de nouvelles problématiques importantes, notamment l’amélioration de la scalabilité, de la sécurité, de la décentralisation et de l’expérience utilisateur.
L’ambition est de permettre à Ethereum d’accroître sa décentralisation et sa résistance à la censure, d’atteindre un haut niveau de performance, de le conserver même lorsque le nombre d’utilisateurs augmente drastiquement, et de maintenir des frais d’utilisation accessibles à tous.
Pour atteindre ces objectifs, Vitalik Buterin a publié une nouvelle version détaillée de la roadmap en novembre 2022, à l’occasion de la mise à jour The Merge, marquant la transition historique d’Ethereum du Proof of Work vers le Proof of Stake.
Voici les 5 étapes majeures :
- The Surge : mises à niveau liées à la scalabilité des solutions de seconde couche (layer 2) d’Ethereum, avec pour objectif d’accroître leurs performances et d’atteindre les 100 000 transactions par seconde.
- The Scourge : mises à niveau liées à la résistance à la censure, à la décentralisation, et aux risques de MEV (Maximal Extractable Value) pour le protocole.
- The Verge : mises à niveau visant à faciliter drastiquement la vérification des blocs d’Ethereum, en mettant l’accent sur la simplification, en facilitant l’accès aux données et en implémentant un nouveau type de preuve cryptographique (SNARK).
- The Purge : mises à niveau permettant de simplifier le protocole en allégeant l’historique des données à conserver par les nœuds, réduisant ainsi les coûts de calcul pour les faire fonctionner et accélérant leur synchronisation au réseau.
- The Splurge : cette dernière étape est encore en construction et inclut toutes les autres mises à niveau qui ne rentrent pas dans les catégories précédentes, notamment l’introduction de nouvelles fonctionnalités pour les développeurs.
La roadmap d’Ethereum a jusqu'à présent été correctement suivie par les équipes de développement. Bien qu’elles constituent des modifications structurelles du protocole, la mise à jour The Merge et la récente implémentation du proto-danksharding, une mise à niveau majeure de The Surge, ont eu lieu sans aucun incident notable et tiennent déjà leurs promesses.

Ether (ETH) : la cryptomonnaie d’Ethereum
L’Ether (ETH) est la cryptomonnaie native de la blockchain Ethereum et joue un rôle central dans l'écosystème, bien au-delà d'un simple moyen d'échange. Contrairement à Bitcoin, souvent perçu comme une réserve de valeur ou une forme d'or numérique, l’Ether a été conçu comme une pierre angulaire, permettant d’alimenter et de faire fonctionner le réseau Ethereum.
Les tokenomics de l’Ether sont extrêmement importantes pour appréhender sa valorisation et son fonctionnement. D’un point de vue théorique, l’offre totale d’ETH est infinie. Néanmoins, plusieurs éléments influencent son inflation et le nombre de tokens en circulation.
D’abord, il est important de noter que lors du lancement du réseau Ethereum en 2015, 72 millions d’ETH ont été créés. Environ 83 % d’entre eux ont été distribués aux investisseurs lors de l’ICO, tandis que le reste a été distribué aux développeurs de l’équipe et à la Fondation Ethereum.
Lorsque la blockchain Ethereum fonctionnait encore sur un mécanisme de Proof of Work, l’Ether était inflationniste. Ainsi, en l’espace de 7 années, le nombre d’ETH en circulation est passé de 72 millions à plus de 120 millions. Néanmoins, l’implémentation de l’EIP-1559 (introduisant un “burn” de tokens en fonction de l’activité) et le passage au Proof of Stake ont inversé la tendance, rendant ainsi la cryptomonnaie déflationniste.
L’Ether recouvre plusieurs rôles au sein de l’écosystème Ethereum. D’abord, la cryptomonnaie est le carburant permettant aux utilisateurs de payer les frais de transactions au réseau, aussi appelés “gas”. Cela assure non seulement la simplification, la sécurisation et l’accélération des opérations, mais également la stimulation de l’activité économique d’Ethereum.
Par ailleurs, l’Ether est aussi utilisé comme un actif de réserve pour diverses applications de DeFi. Il peut être verrouillé en tant que garantie dans des protocoles de prêt, utilisé pour fournir des liquidités dans des exchanges décentralisés ou être déposé pour générer des rendements grâce au yield farming.
Enfin, l’Ether joue un rôle crucial dans la gouvernance de certaines plateformes décentralisées et dans les DAO, où les détenteurs d’ETH peuvent participer à des décisions collectives sur l’avenir de ces protocoles. Ce rôle multifonctionnel fait de l’Ether une pièce maîtresse de l’écosystème Ethereum, combinant des éléments de monnaie, d’investissement et de participation communautaire.
Écosystème et cas d’usage

La Finance Décentralisée (DeFi)
La capacité de développer des smart contracts pour construire des applications complexes a ouvert un champ de possibilités immense pour Ethereum. L’un des domaines les plus florissants est probablement la finance décentralisée, ou DeFi, un secteur qui réinvente les services financiers en les rendant accessibles à tous, sans conditions préalables et sans avoir besoin de passer par des institutions financières traditionnelles.
Au même titre que Bitcoin a ouvert la voie aux paiements de pair-à-pair, sans avoir recours à un intermédiaire de confiance, la finance décentralisée élimine la nécessité de faire confiance à une entité centralisée pour accéder à des services financiers. En effet, les transactions sont régies par des smart contracts qui s'exécutent automatiquement lorsque des conditions prédéfinies sont remplies.
Ces smart contracts, couplés à la blockchain Ethereum, offrent une transparence et une sécurité accrues, car ils fonctionnent sur une base de code public et sont immuables une fois déployés. Mais surtout, il n’y a pas de distinctions des utilisateurs, puisque les règles sont les mêmes pour tous.
De manière générale, les applications décentralisées (dApps) qui composent l'écosystème DeFi d’Ethereum permettent aux utilisateurs d’échanger, de prêter ou d’emprunter des actifs, mais également de générer des intérêts sur ceux-ci. En voici quelques exemples :
- Exchanges décentralisés (DEX) : ils permettent aux utilisateurs d’effectuer des échanges entre différentes cryptomonnaies sans que leurs fonds ne soient gérés par une entité centralisée. Cela permet aux utilisateurs de conserver de bout-en-bout la souveraineté de leurs actifs. Le DEX le plus célèbre est actuellement Uniswap.
- Les services de prêts et d’emprunts : ils permettent aux utilisateurs de déposer des cryptomonnaies afin de permettre à d’autres de pouvoir les emprunter, générant ainsi des rendements intéressants. Encore une fois, la plateforme ne gère pas les fonds des utilisateurs puisque chaque opération est réalisée par les smart contracts. Les applications les plus connues sont Aave, Compound ou encore Curve.
- Les applications de yield : elles permettent aux utilisateurs de générer des rendements grâce à leurs cryptomonnaies. Les principaux produits proposés sont le “Liquidity Providing”, où les investisseurs fournissent de la liquidité, nécessaire au fonctionnement de nombreuses applications, en échange d’une rémunération. L’application la plus célèbre est certainement Pendle.
- Le Liquid Staking : Dans le cas d’Ethereum, il est nécessaire de verrouiller 32 ETH pour créer un noeud, ce qui est contraignant. Les protocoles de Liquid Staking propose de faciliter cette activité en l’ouvrant à tous, sans limite minimale de dépôt. Par ailleurs, les utilisateurs reçoivent un token miroir de leur dépôt, pouvant être utilisé dans d’autres applications de DeFi, rendant ainsi “liquide” le staking sur une blockchain.

Les Organisation Autonomes Décentralisées (DAO)
Les organisations autonomes décentralisées (DAO) sont une autre innovation qui trouve ses racines sur Ethereum. Une DAO est une organisation gérée par des smart contracts et gouvernée par ses membres, sans aucune autorité centrale. Les décisions au sein d'une DAO sont prises de manière collective, souvent par le biais de votes utilisant des tokens spécifiques à l'organisation.
Les DAO sont utilisées pour diverses fins, allant de la gestion de fonds communautaires aux décisions majeures pour l’avenir du projet. Elles incarnent la vision du Web3, où les utilisateurs ne sont pas seulement des consommateurs mais aussi des propriétaires et des gestionnaires des services qu'ils utilisent.
L’utilisation des DAO dans le cas des applications de finance décentralisée (DeFi) est particulièrement fréquent. En effet, les DAO permettent une décentralisation du pouvoir entre les utilisateurs, donnant ainsi un rôle plus important au token. Par ailleurs, les membres d'une DAO peuvent proposer et voter sur des changements au sein du protocole, tels que l'ajustement des taux d'intérêt, la modification des rendements liés au staking ou l'ajout de nouveaux actifs à la plateforme.
À titre d’exemple, la DAO la plus célèbre dans le cadre d’une application de finance décentralisée est Maker DAO. Cette dernière est à l’origine de l’émission du stablecoin DAI et est gérée de manière totalement autonome par les détenteurs de tokens MKR. Ils peuvent ainsi décider de la composition de la réserve du stablecoin, des rendements, des partenariats et de bien d’autres choses.
Les stablecoins USDT, USDC ou encore DAI
Nous l’avons évoqué dans la partie précédente, les stablecoins représentent une partie non négligeable de l’écosystème Ethereum. Après plusieurs initiatives infructueuses sur Bitcoin, c’est la blockchain de Vitalik Buterin qui a pu réellement donné naissance à ces tokens. Leur objectif est de maintenir une valeur stable constante en s’adossant à une monnaie fiduciaire classique, principalement le dollar.
À l’heure de l’écriture de cet article, en 2024, les deux stablecoins les plus capitalisés sont l’USDT et l’USDC. Ils sont émis par des entreprises centralisées, respectivement Tether et Circle. Néanmoins, le troisième au classement est le DAI, un stablecoin dit “décentralisé”.
En effet, la parité du DAI avec le dollar est assurée par une réserve en actifs, elle-même maintenue par les smart contracts de Maker DAO et par les utilisateurs ayant déposé des fonds.
Les tokens non fongibles (NFT)
Les tokens non fongibles (NFT) sont une autre innovation majeure ayant réellement vu le jour sur Ethereum. Contrairement aux cryptomonnaies classiques qui sont fongibles (chaque unité est interchangeable avec une autre), les NFT sont uniques par nature, en fonction de ce qu’on leur adosse à côté. Cela a ouvert la voie à une nouvelle manière de posséder, d'échanger et de prouver la propriété d'une large gamme de biens.
Comme ces tokens sont particuliers, le standard ERC-20 n’était plus du tout adapté. Pour cette raison, les développeurs d’Ethereum ont conçu le standard ERC-721, largement reconnu comme la technologie sous-jacente des NFT et permettant de facilement créer des actifs numériques uniques et traçables.
Sur le papier, les NFTs sont utilisés pour certifier l'authenticité d'œuvres d'art numériques, de vidéos, de musique, et même d'objets physiques comme des biens immobiliers, des pièces de luxe ou des objets précieux. Ils peuvent également servir à la gestion des identités numériques, à la traçabilité des produits ou encore à la billetterie. Pour le moment, ils ont particulièrement réussi à remodeler le monde de l’art en offrant aux créateurs une nouvelle manière de se rémunérer.
En 2021, le marché des NFT a particulièrement explosé. Plus précisément, ce sont les “collectibles”, des collections de plusieurs milliers d’image aux traits variables (à l’instar des cartes Pokemon ou des Panini). Les plus célèbres sont les Cryptopunks ou les Bored Ape Yacht Club (BAYC), dont certains ont atteint des millions de dollars l’unité.
Gaming et metaverse
Le secteur du jeu vidéo et des mondes virtuels (metaverses) est entré en pleine mutation avec le développement des technologies sur Ethereum. En effet, l’intégration de NFT permet aux joueurs de réellement posséder les objets qu’ils acquièrent dans ces mondes, donnant enfin du sens aux dizaines d’heures passées derrières son ordinateur.
Étonnamment, c’est l’un des premiers cas d’usage imaginé par Vitalik Buterin lorsqu’il a souhaité concevoir Ethereum, lorsqu’il était un grand joueur de World of Warcraft. En effet, la possibilité de collecter des objets virtuels, de les échanger ou de les revendre sur des marchés secondaires permet de monétiser l’expérience utilisateur.
Les metaverses, quant à eux, utilisent les NFT pour représenter des terrains virtuels, des avatars, et d'autres objets numériques, créant ainsi des mondes où les utilisateurs peuvent véritablement posséder et échanger des biens numériques. Cette interopérabilité entre différents jeux et plateformes est rendue possible grâce à la blockchain, qui assure la transparence et la traçabilité des transactions.
En outre, les metaverses offrent des opportunités uniques pour les créateurs de contenu, les artistes, et les développeurs, leur permettant de monétiser leurs créations dans un environnement numérique global et décentralisé. À mesure que ces univers numériques se développent, ils pourraient bien devenir le prochain grand marché pour l'innovation numérique.

Marché et concurrence
En tant que première blockchain à smart contract, Ethereum a réussi à capitaliser sur son statut de pionner pour s’imposer comme le leader incontestable du secteur. Ce “First Mover Advantage” a été un avantage considérable dans un domaine aussi compétitif, lui permettant d’attirer énormément de développeurs, d’utilisateurs et d’investisseurs.
Malgré cela, le secteur n’est pas sans concurrence. Plusieurs autres protocoles de blockchain à smart contract ont émergé au fil des ans, cherchant à rivaliser avec Ethereum en répondant à ses principales limitations, telles que les frais de transaction élevés et la faible scalabilité.
Des projets comme Solana, la Binance Smart Chain (BNB Chain), Tron, Avalanche, Fantom, Cardano ou plus récemment Sui, Aptos et Sei, ont réussi à capter une part du marché en adoptant des stratégies variées. Certains misent sur une vitesse d’exécution accrue et des frais réduits, tandis que d'autres se concentrent sur des solutions spécifiques, comme l'interopérabilité ou l'efficacité énergétique.
Néanmoins, Ethereum reste encore le standard de référence, avec une adoption largement supérieure, une infrastructure de développement plus robuste et éprouvée, ainsi qu’un écosystème d'applications et de services incomparable.
D’un point de vue de la Total Value Locked (TVL), soit le montant total de cryptomonnaies placées dans les protocoles d’une blockchain, Ethereum écrase la concurrence avec la 50 milliards de dollars. Cela représente 58 % de toute la valeur placée sur des blockchains, tandis que Tron et Solana complètent le podium avec respectivement 7 et 5 milliards de dollars de TVL.
En termes de développeurs et d’applications décentralisées, le constat est similaire. Le nombre de protocoles déployés sur Ethereum dépasse 1100, bien plus que Solana (150) ou la BNB Chain (700).
Voici quelques données sur Ethereum :
- TVL : 50 milliards de dollars
- Nombre de protocoles : 1150
- Nombre d’utilisateurs actifs par jour : 500 000
- Capitalisation de l’actif : 320 milliards de dollars
À noter néanmoins qu’au cours de l’année 2024, les utilisateurs actifs de la blockchain se tournaient de moins en moins vers Ethereum, au profit d’un concurrent : Solana. Bien aidé par des frais dérisoires, une vitesse d’exécution très élevée et un écosystème florissant de memecoins, Solana a réussi à faire de l’ombre au leader du domaine.
Les métriques on-chain sont particulièrement intéressantes pour constater cette dynamique dans le secteur des blockchains à smart contract. Du côté d’Ethereum, le nombre de transactions atteint généralement un peu plus d’un million chaque jour, soit une moyenne de plus de 30 millions par mois. Concernant Solana, ce sont plutôt entre 25 et 40 millions de transactions chaque jour.
Ensuite, le nombre d’adresses actives chaque jour sur Ethereum oscille entre 400 000 et 600 000 pour une moyenne mensuelle d’environ 11 millions. Pour Solana, ce chiffre est en croissance constante et atteint 2 millions chaque jour, soit environ 50 millions par mois. Quant aux nouvelles adresses créées, elles sont de l’ordre de 100 000 chaque jour sur Ethereum contre environ 1 million sur Solana.
Quelques données sur Solana :
- TVL : 4,7 milliards de dollars
- Nombre de protocoles : 161
- Nombre d’utilisateurs actifs par jour : 2 000 000
- Capitalisation de l’actif : 60 milliards de dollars
Toutefois, l'hégémonie d’Ethereum est loin d’être terminée. Pour maintenir sa position de leader, Ethereum continue d’évoluer, notamment avec la transition vers le Proof of Stake (PoS) et l’amélioration de la scalabilité via les solutions de seconde couche (layer 2) et le sharding. Ces innovations sont cruciales pour répondre aux défis posés par la concurrence.
Par ailleurs, avec l’institutionnalisation de l’écosystème, les acteurs traditionnels se tournent naturellement vers Ethereum pour concevoir des applications sur la blockchain, à l’instar du fonds tokénisé de BlackRock. Cela devrait continuer d'asseoir la domination d’Ethereum dans le domaine des réseaux à smart contract.
Conclusion
Ethereum a redéfini ce que signifie être une blockchain, évoluant bien au-delà du simple transfert de valeur pour devenir une plateforme globale d'innovation décentralisée. À travers l’introduction des smart contracts et une transition vers le Proof-of-Stake, Ethereum a construit un écosystème dynamique et résilient, capable de soutenir un large éventail de cas d'utilisation, de la finance décentralisée (DeFi) aux applications Web3 en général.
Le réseau continue de se développer et de s'adapter, répondant aux besoins croissants de sa communauté mondiale d'utilisateurs, de développeurs et d'entreprises. Avec des mises à jour comme Ethereum 2.0 et un engagement constant envers l'amélioration de l'évolutivité et de la durabilité, Ethereum s'affirme comme une infrastructure incontournable pour l'avenir de l'Internet décentralisé.
En somme, Ethereum est plus qu'une simple blockchain : c'est un écosystème en perpétuelle évolution, conçu pour façonner la prochaine ère numérique en donnant aux individus et aux organisations les outils nécessaires pour créer et innover de manière libre et décentralisée.